Frédéric Laloux, Reinventing OrganizationsCette page vise à présenter le stade évolutif Opale, conceptualisé par Frédéric Laloux (écrivain et ancien partenaire associé chez McKinsey) dans le livre Reinventing Organizations, et sa déclinaison dans les mondes entrepreneurial et institutionnel. (Ici le mot Opale est toujours utilisé comme nom propre, donc avec majuscule et invariable, il peut se traduire par Teal en Anglais.) Je compléterai aussi l’enseignement de F. Laloux par mes expériences et réflexions.

Précision : Dans le texte ci-dessous, les numéros de pages entre parenthèses renvoient tous à l’édition française éditée chez Diateino en 2015.

Au cours de son histoire, notre espèce a connu différents stades de conscience et d’organisation.

Frédéric Laloux présente ces 7 stades successifs à l’aide de couleurs :

  1. Infrarouge : Groupe d’une douzaine de membres maximum. Violence omniprésente. Faible conscience de l’individualité.
  2. Magenta : Tribus pouvant compter plusieurs centaines de membres. Monde magique et ritualisé. Violence très présente.
  3. Rouge : Chefferies pouvant compter plusieurs dizaines de milliers de membres. Elles évoluent dans l’instant présent et dans un environnement hostile. Elles pratiquent la division du travail. Les relations sont cimentées par l’exercice du pouvoir. On y trouve des accès de violence.
  4. Ambre : États ou civilisations. Ces structures sont inamovibles, ethnocentriques, extrêmement stratifiées, marquées par des inégalités massives. Les individus cherchent à se conformer à l’opinion d’autrui, pratiquent l’autodiscipline et se perçoivent sur un temps linéaire.
  5. Orange : Pyramide rigide avec une forte stratification sociale (symbolisée par des titres, grades, uniformes), pouvant compter des milliers d’ouvriers. On pense en haut, on fait en bas. Ordre/vérification (management par objectifs). L’efficacité remplace la morale. Plus = mieux. Vide existentiel. C’est le paradigme dominant actuellement dans nos États, entreprises et écoles. Perspective universaliste.
  6. Vert : Les relations sont plus importantes que les résultats. Apparition de processus ascendants.
  7. Opale : Cette page vise à présenter ce stade.

Le stade Opale est considéré comme étant le dernier de ces 7 stades. 5% de la population occidentale serait à ce jour en phase avec ce stade naissant, une proportion que nous pouvons espérer voir grossir par capillarité.

Cette page vous permet de rapidement comprendre ce paradigme et d’évaluer votre position par rapport à celui-ci. Si vous êtes déjà sur un mode de conscience Opale, le présent contenu vous semblera limpide et passionnant. Si ce n’est pas le cas, vous aurez au moins appris l’émergence d’un paradigme autre et peut-être que vous y reviendrez plus tard.

Voici quelques caractéristiques du stade évolutif Opale :

  • On dépasse les peurs de son égo pour percevoir l’abondance de la vie.
  • La notion de propriété est futile. On pourra plutôt rechercher la « gestion » d’une chose tant :
    • 1) qu’on en prend soin,
    • 2) qu’on la rend utile,
    • 3) et qu’on accepte de la transmettre si les points 1 (soin) et 2 (utilité) ne sont plus satisfaits.
  • On est conscient de l’interdépendance et de l’unité de tous les éléments.
  • Leur diversité maximale n’est pas perçue comme une menace, elle est célébrée comme une chance et une force.
  • On sort des logiques consigne-surveillance, bâton-carotte pour faire confiance.
  • La finitude des ressources de notre planète et la notion de limites ne sont plus des tabous.

Je vous invite à partager vos impressions et à enrichir cette page en utilisant l’espace commentaires en bas de cette page.

Bonne lecture !

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Entreprises Opale

Qu’elle soit à but lucratif ou non, une entreprise Opale (ou « entreprise libérée ») n’est pas une compilation de « trucs » prêts à l’emploi. C’est avant tout une approche globale et radicalement singulière reposant sur des convictions et des valeurs autres.

Tout comme pour la permaculture, l’idée centrale est d’épouser les grands principes du vivant, plutôt que de lui imposer les nôtres par peur de perdre notre prétendu contrôle.

Pas de mode d’emploi absolu donc, mais des récurrences. Voici les principales :

La raison d’être de l’entreprise

Toute organisation Opale doit avoir une raison d’être. C’est son but, sa boussole. C’est à cette raison d’être que tous doivent se référer lorsqu’ils agissent, créent, décident et conseillent. Pour que tous convergent dans la même direction, la raison d’être doit être parfaitement comprise et intégrée par tous.

Astuce : ne pas figer par écrit la raison d’être de l’organisation, mais la partager sans cesse verbalement. Cela lui permet une existence plus souple pouvant évoluer selon les besoins et les ressentis.

Une vision négative ou positive de l’humain ?

Nous avons généralement été habitués à nous méfier des autres (ex : Sartre : « L’enfer c’est les autres »; Einstein : « Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine »; etc.), si bien que lorsqu’il s’agit de prendre des décisions importantes, nous sommes peu enclins à faire confiance ! Les postulats les plus courants au sein des entreprises dépeignent les salariés comme paresseux, interchangeables, égoïstes, motivés prioritairement par l’argent, irresponsables, etc.

Aucune organisation Opale ne s’est construite sur de tels postulats. Pour elles, les êtres humains sont a priori dignes de confiance, singuliers, capables, responsables, mais aussi faillibles.

L’expérience (cf. Douglas McGregor, années 1960) montre qu’une organisation fonctionnant sur la suspicion et le contrôle créera des individus réfractaires et tricheurs, tandis que les postulats positifs engendreront un climat vertueux (p. 163). Ainsi, il peut être bon que, en parallèle de sa raison d’être, l’entreprise définisse clairement les postulats qu’elle entend défendre au sujet des individus.

Le directeur général (DG)

Tel un jeu de poupées gigognes, le dirigeant est la poupée qui englobe les autres. Ainsi, le niveau de conscience d’une organisation est-il bridé par le niveau de conscience de ceux qui la dirigent.

Une organisation Opale durable est donc une organisation dont les dirigeants et propriétaires (actionnaires) ont eux-mêmes atteint, individuellement, un niveau de conscience Opale. Il n’est pas nécessaire que ce soit le cas de ses salariés, même si cela facilite les choses. La magie Opale est de parvenir à recueillir, grâce à l’agilité inclusive de ses structures, la participation active d’individus aux niveaux de conscience variés. Ici, il n’est pas indispensable que tous soient X pour que tous expérimentent et contribuent à X.

Dans un premier temps, le rôle du DG est d’initier un élan en faveur d’une raison d’être matérialisée sous la forme d’une organisation. Puis, il instaure et maintient le cadre Opale de celle-ci, permettant à tous de s’y sentir en sécurité afin d’être et d’agir au maximum de leur potentiel. Le DG est aussi souvent l’ambassadeur de l’organisation à l’extérieur. Enfin, comme tout un chacun, il contribue au maximum de son potentiel à développer l’organisation dans le sens de sa raison d’être.

Le DG doit être le premier défenseur du fonctionnement Opale, notamment lors des coups durs où les anciens réflexes peuvent venir l’assaillir. Il doit être exemplaire, y compris en exprimant ses possibles difficultés à suivre les principes Opale.

Le recrutement

Il est essentiel de s’assurer que chaque nouvelle recrue comprenne et adhère avec enthousiasme :

  • à la raison d’être de l’entreprise,
  • à sa vision positive de l’humain (voir plus haut),
  • et à son fonctionnement Opale.

Il est également crucial que cette raison d’être collective soit compatible (et bénéfique) avec la raison d’être personnelle de celui qui la rejoint. Pour ces raisons, les entretiens d’embauche peuvent demander plus de temps. On préférera laisser un poste vacant plutôt que de le remplir avec quelqu’un qui ne convienne pas vraiment.

Certaines entreprises demandent à leur nouvelle recrue de passer par tous les postes de l’entreprise sur une durée de quelques mois afin qu’elle acquière une conscience globale du système qu’elle vient de rejoindre. Au terme de ce parcours interne, il n’est pas rare que l’individu se découvre des aptitudes insoupçonnées et rejoigne un poste plus adapté que celui initialement prévu.

La formation et l’accompagnement

Les nouvelles recrues suivent également un premier corpus de formations identique pour tous leur permettant d’acquérir les bases des fonctionnements Opale de l’organisation. Par la suite, tous les membres de l’organisation sont continuellement formés et accompagnés pour profiter au mieux des dispositifs Opale. Il s’agit de nous défaire de certains automatismes transmis à l’enfance (compétition, formatage impersonnel, rôles théâtralisés, etc.) et de réapprendre un fonctionnement nouveau.

Certaines entreprises Opale mettent à disposition de leurs équipes une enveloppe fixe et périodique (ex : 3% du CA divisés par le nombre d’équipes, tous les 6 mois) qu’elles sont libres de dépenser dans les formations qui leur semblent les plus pertinentes pour concourir à la raison d’être de l’entreprise.

La sincérité et la transparence

En mode Opale, il ne s’agit plus de porter un masque, mais d’être sincère. Les employés doivent être pleinement eux-mêmes, dans le respect de la raison d’être de l’entreprise et de leurs collègues.

La sincérité implique une réelle transparence. Celle-ci se joue sur deux niveaux :

  • La transparence quantitative : nombre d’employés, salaires de chacun, chiffres d’affaires, impôts, etc.
  • La transparence qualitative : situations, problématiques, enjeux, émotions, etc.

Une écoute authentique et une réponse juste

Pour servir au mieux la raison d’être de l’organisation, il faut entendre nos intuitions profondes. Ne pas s’autocensurer dans nos réponses, nos choix.

L’autodétermination et la complémentarité des rôles

Dans une organisation Opale, les hiérarchies de pouvoir font place aux hiérarchies de rôles, tous mutuellement importants. Dans une forêt, les mycéliums, les herbacées, les arbres, les animaux, sont tous nécessaires à l’équilibre et à la luxuriance de l’ensemble. Une fougère ne peut se prétendre écureuil bien longtemps.

Chacun trouve les rôles qui lui conviennent le mieux. Si notre rôle cesse d’avoir une place viable, il convient de le faire évoluer ou d’en changer totalement.

Ainsi est-il rare que l’on recourt à des intitulés de postes lors des recrutements.

Tout le monde a du pouvoir à condition qu’il consulte les personnes concernées avant de l’exercer

Tout le monde est invité à prendre des décisions pouvant contribuer à la raison d’être de l’entreprise. Elles peuvent être petites (ex : renouveler un stock de fournitures) ou plus conséquentes (ex : décider de l’ouverture d’une filiale à l’étranger). Mais dans tous les cas, la personne doit consulter l’ensemble de ses collègues pouvant être concernés par sa décision, recueillir attentivement les avis de chacun et agir en conscience. Lorsque le nombre d’individus à consulter est grand, voire très grand, la personne les consulte via l’Intranet de l’organisation. À la fin de ce processus, personne, pas même le DG, ne peut s’opposer à l’exécution de la décision.

Ne pas respecter cette étape est grave et peut être motif de licenciement.

L’absence d’ascenseurs décisionnels a plusieurs conséquences de taille :

  • Pas de détérioration de l’information, dans un sens comme dans l’autre.
  • Pas d’épuisantes réunions périodiques.
  • La strate des managers est retirée. Les managers sont invités à se recycler vers des rôles productifs. Empiriquement, on peut s’attendre à ce que la moitié des managers choisisse de quitter une entreprise au cours des deux premières années suivant sa réforme Opale (p.253).
  • Les fonctions de support – ressources humaines, planning stratégique, juridique, finance, communication, management du risque, audit, contrôle qualité, relations publiques, etc. – sont nettement réduites. Chez Buurtzorg, le siège, avec ses fonctions de support, ne compte que 30 salariés pour 7000 infirmier(ère)s sur le terrain (p.112) !

générant des allégements temporels, financiers et structurels considérables.

Pas plus de performance, mais moins de gâchis

La vision taoïste, extrême-orientale, s’oppose à celle de l’activisme occidental. Ainsi pour le taoïste la plénitude est atteinte lorsqu’il n’y a plus rien à retirer (et non pas lorsqu’il n’y a plus rien à accumuler, quête insatiable et destructrice).

Une récente étude (cf. mypandora.io) montre que 90% des cadres français n’osent pas exprimer leurs idées au sein de leur entreprise, en raison de l’atmosphère non sécurisante qui y règne (peur du jugement, de l’exclusion). Cette auto-censure représente un gâchis de talents/temps/énergie/argent vertigineux.

Plutôt que de courir après la performance, il est conseillé de valoriser l’existant et la performance adviendra en conséquence.

Rechercher l’amélioration, pas la perfection

Alors que le paradigme Vert cherche le consensus, le paradigme Opale cherche le consentement. Le consensus ambitionne d’établir LA solution parfaite qui convient à tous. Cette logique du tout ou rien est bien souvent épuisante et frustrante. Le consentement cherche plutôt une voie médiane permettant d’établir une bonne solution, corrigeable ultérieurement, qui ne bloque pas les choses.

Cf. la méthode de la « sociocratie« .

Ne pas empêcher les individus de fonctionner à l’optimum de leurs potentiels

Les outils traditionnellement mis en place pour conformer et surveiller les employés sont souvent restrictifs et démotivants. En théorie, ils donnent aux dirigeants une impression de contrôle et un sentiment de supériorité. En pratique, ils sont contre-productifs et font que 8 salariés sur 10 ne se sentent nullement investis dans leur travail et reportent leurs élans dans leurs activités extra-professionnelles ou la perspective de la retraite. Pire, cela peut pousser, en retour, les salariés à attaquer leur entreprise de l’intérieur (vol, fraude informatique, détournement de fonds, vandalisme, sabotage ou absentéisme). On parle ici de « comportements déviants négatifs » et 75 % des employés y auraient déjà succombé.

À l’inverse, certains salariés qu’on peut qualifier de « déviants positifs », enfreignent volontairement les règles pour faire plus en faveur de leur organisation ou des membres qui la composent. Mathilde Brière en donne plusieurs exemples.

Les individus veulent généralement être davantage et sont souvent frustrés, consciemment ou non, d’être tant limités. Laissons-les faire !

Liberté et responsabilité sont indissociables

Chaque individu ou groupe fixe ses propres objectifs. Il a l’entière responsabilité de trouver lui-même le chemin pour les atteindre, avec l’aide que peuvent lui apporter ses pairs. Il n’y a pas d’autorité supérieure sur laquelle se décharger ou rejeter le blâme.

Nous avons la responsabilité totale des conséquences de nos choix, car personne ne peut nous empêcher de prendre une décision (si nous avons préalablement consulté les personnes concernées), ni nous imposer nos rôles ou agissements.

Nous sommes libres et responsables dans un contexte constitué de multiples acteurs et contraintes.

On arrête de chiffrer

Dans les entreprises Opale il n’y a ni prévisionnel à long terme (pas plus loin que le prochain trimestre ; le mouvement constant du monde rend illusoire la maîtrise du temps), ni budgets, ni objectifs chiffrés (trop souvent castrateurs ou intenables).

Acceptation et lâcher-prise

Les dirigeants doivent accepter que leurs collaborateurs en sont là où ils en sont (en termes de conscience, d’efficacité, de capacités), notamment en intégrant l’idée d’une certaine « marge d’erreur, d’imperfection ». En lâchant prise, ils adoucissent le climat général et s’abstiennent de le parasiter.

De petites équipes autonomes

La forme la plus commune des entreprises Opale est la fédération de petites équipes autonomes. Leur taille à échelle humaine facilite la connaissance mutuelle, la communication, la transparence, l’adaptabilité, et les prises d’initiatives. Chaque équipe fixe ses objectifs et son fonctionnement, détermine et réclame son budget auprès du siège, recrute les employés dont elle a besoin.

La permanence du mouvement

L’ancien modèle mécanique voulait que les entreprises adoptent épisodiquement de grands changements décidés par un comité directeur, puis imposés du haut vers le bas dans un climat de peur de la concurrence. L’organisation Opale est un organisme vivant qui évolue par micro réajustements permanents décidés à tout instant par l’ensemble des particules qui le composent.

Des réunions sans ordre du jour

La constitution d’un ordre du jour en amont des réunions peut être fastidieuse, chronophage et inadaptée aux aléas de dernière minute.

On préférera assigner à chaque réunion un objectif précis (question opérationnelle, remontée d’infos, temps de partage en équipe), sans ordre du jour.

Plusieurs formats, de différentes fréquences et durées, ont été pensés en ce sens :

  • La mêlée (15mn) : chaque personne expose en 1 minute ses avancées, ses objectifs et ses difficultés ; la mêlée se déroule debout. En savoir plus.
  • La réunion de triage (45mn à 1h) : chaque personne expose ses points de blocage afin d’être orientée vers la personne ou l’outil qui lui permettra de trouver sa solution ; ici l’ordre du jour est dressé par tous en début de réunion.
  • La réunion rétrospective : elle se déroule en 5 phases :
    1. ouverture
    2. remontée d’informations
    3. générer des idées
    4. décider d’une action
    5. clôture).

    En savoir plus.

  • Le forum ouvert (entre une demi-journée et plusieurs jours) : le forum permet de faire le point sur un sujet de fond. Il est découpé en créneaux de discussion (de 45mn à 1h) et est sous-tendu par quatre principes fondamentaux :
    1. Les personnes qui sont là sont les bonnes.
    2. Ce qui arrive est ce qui devait arriver.
    3. Ça commence quand ça commence.
    4. Ça finit quand ça finit.
  • Etc.

Souvent ces réunions se passent très bien de compte-rendu.

Des élections sans candidats

Il y a deux grandes manières de diriger :

  1. par la violence (afin que les autres se soumettent par crainte ou pour tenter d’améliorer la relation),
  2. ou par l’amour (chacun recherchant l’amour, celui qui est authentiquement aimant et bienveillant attire à lui et suscite le zèle).

En mode Opale, lorsqu’un groupe doit se choisir un représentant, on peut demander à chacun de ses membres d’exprimer sa préférence. Puis, on demande à la personne recevant le plus de « voix », si elle accepte le poste. On parle ici d’élection sans candidat.

Une élection avec candidats va favoriser les personnes dominant par la violence (souvent ambitieuses, elles n’hésitent pas à écraser pour monter ; cela ne garantit ni la compétence, ni la sagesse). À l’inverse, une élection sans candidats favorise les personnes qui agissent dans l’amour, puisque les votants les préfèrent. Ainsi, le résultat est-il souvent bien différent selon la méthode employée.

Notons que ce principe existe depuis l’Antiquité, au moins : tirage au sort à Athènes ; choix de justes parmi les apôtres de Jésus après la résurrection ; élection des papes, évêques, prieurs sans candidat ; etc.

Difficultés internes : la résolution des conflits

Voici les grandes étapes de la résolution de conflit type :

  1. Parmi les individus en conflit, l’un doit initier un tête-à-tête en utilisant le processus de la communication non violente (CNV), c’est-à-dire partir de ses émotions pour mettre en lumière ses besoins insatisfaits, puis formuler une proposition claire, sans jugement ni exigences.
  2. Si cette première tentative échoue, les individus en conflit sont invités à se choisir une personne en qui ils ont confiance comme médiateur.
  3. Si on ne parvient à aucune solution, alors un jury composé de collègues compétents sur le sujet de la discorde aide les personnes à trouver un arrangement.
  4. En dernier recours, le DG peut intégrer ce jury (cas rare).

Conseils généralistes :

  • Ces grandes étapes doivent être enseignées à tous dès le départ (en amont des conflits éventuels).
  • Mieux vaut faire les remarques à chaud.
  • Si un individu souhaite faire une remarque, il lui est conseillé de préalablement questionner son interlocuteur « Es-tu disposé(e) à ce que je t’expose ma pensée ? » et à ne le faire que s’il obtient une réponse positive.
  • Mieux vaut dire « J’ai un souci avec le rôle X », plutôt « qu’avec un tel/une telle ». Cela crée une distance moins passionnelle.
  • Les médiateurs ne peuvent pas imposer leurs vues. Ils sont là pour accompagner et proposer.
  • Tous s’engagent à ce que les échanges restent privés et confidentiels.

Difficultés externes : la gestion des crises

Toutes les organisations connaissent des phases difficiles, la différence réside dans la manière de les désamorcer et de les traverser.

En cas de crise, il est préférable de rester fidèle à la gouvernance partagée, car la trahir abruptement nuirait à la confiance patiemment élaborée jusque-là. Là encore, la transparence est la clé (pp. 155-158). Partager ouvertement avec tous la problématique qui nous assaille permet d’en partager la charge et de faire appel à l’engagement de chacun pour dégager une solution commune.

Dans le cas où les dirigeants décideraient d’un retour en mode autocratique, ils devraient le faire uniquement sur un temps et un sujet préalablement délimités, en confier la charge à une personne n’ayant pas d’ambition personnelle au sein de l’entreprise (ex : un consultant extérieur), et être transparents auprès de tous sur ce changement temporaire et les raisons qui le motivent.

Éviter à tout prix d’imposer, via un simulacre participatif, des solutions préétablies en catimini.

Développer la gratitude

Les entreprises Opale cultivent la gratitude. Des rituels sont inventés pour favoriser les compliments entre collègues et le remerciement.

En fin d’année peut se dérouler un bilan individuel de chaque salarié. Cet événement ne doit pas déboucher sur une liste de critiques blessantes (les choses à améliorer doivent être discutées à chaud tout au long de l’année), mais, au contraire, sur une gratitude générale et une perspective positive, afin que l’individu, ainsi remercié, se sente reconnu et encouragé. C’est une conclusion en forme de marchepied pour l’année à venir, envisagée comme meilleure encore.

Idée de pratique : les membres de l’entreprise peuvent définir les qualités qui leur sont chères (fiabilité, compétence, partage et bonne communication, adaptabilité, amabilité…). Chacune de ces qualités est associée à une couleur et chaque membre de l’entreprise reçoit X perles de chaque couleur qu’il doit entièrement distribuer au cours de l’année à ses collègues en fonction des qualités qu’il reconnaît chez eux. Si un individu voit qu’une ou plusieurs couleurs lui font défaut, il en déduira qu’il devra faire des efforts dans ces domaines pour rétablir l’équilibre.

Auto-détermination de l’implication

Il est judicieux de faire des réunions périodiques, où l’on se demande mutuellement combien de temps et d’énergie nous sommes prêts à consacrer à l’organisation. Chacun peut ainsi librement estimer la répartition de son temps entre la raison d’être collective et sa raison d’être personnelle.

Auto-détermination des salaires

La plupart des entreprises Opale :

1. Fixent une échelle des salaires visant à proscrire les écarts qu’elles estiment indécents.

2. Laissent le soin à leurs employés de fixer leurs salaires sur cette échelle. Pour ce faire ils peuvent être invités à considérer leur implication, à s’évaluer mutuellement ou à soumettre à leurs collègues les arguments en faveur d’une éventuelle augmentation. On veillera aussi à ce que les rémunérations de chacun soient rendues publiques et que les dirigeants jouent le jeu (notamment en modulant leurs salaires selon la santé de l’entreprise). L’expérience montre que lorsqu’ils sont responsabilisés, les individus sont très aptes à s’auto-évaluer avec justesse et sans abus.

Bonus financiers

Les bonus individuels sont déconseillés en raison de leur capacité à susciter les jalousies et à disloquer l’unité et la coopération. En effet, la guerre civile n’a jamais permis à un pays de se développer, et cela ne marche guère mieux au sein d’une entreprise.

Si les bénéfices de l’entreprise sont bons, une partie peut en être partagée, à parts égales, entre l’ensemble de ses membres.

La confiance remplace le contrôle

Une personne qui est sommée d’exécuter des décisions vis-à-vis desquelles elle n’a pas eu son mot à dire, parce que considérée comme inapte, n’est pas à son optimum. Ainsi, les entreprises classiques se sentent-elles obligées de contrôler, pressuriser, menacer, appâter une grande partie de leur personnel pour avancer. Ce fonctionnement est lourd, coûteux, désagréable, non optimal, pathogène.

En mode Opale, l’ambiance est toute autre. On se fait confiance et on s’accompagne.

La concurrence ? Quelle concurrence ?

La notion de concurrence en mode Opale se vide presque de toute substance. Il n’y a pas plus de luttes internes pour monter les échelons en se marchant les uns sur les autres, que de luttes externes pour arracher des parts de marché à des ennemis menaçants. Le seul et unique but est la raison d’être de l’entreprise. Le but est tellement impérieux que Jos de Blok, fondateur de la très florissante entreprise de soins à domicile, Buurtzorg, aux Pays-Bas, se rend régulièrement dans les autres entreprises de son secteur (que nombreux appelleraient ses « concurrents ») pour leur donner des conseils pour optimiser leurs activités, et ce bénévolement ! Pourquoi ? Parce que la raison d’être de Buurtzorg est de dispenser des soins qui mettent la relation humaine au centre, et non pas de devenir les leaders d’un marché (d’ailleurs, ils le sont devenus en moins de 10 ans, sans que ce ne soit jamais leur priorité).

Tout le monde (employés, clients, fournisseurs…) cherche à améliorer ses conditions (pour prolonger son existence). Ainsi nombreux seront ceux à se rediriger vers une entreprise proposant des conditions objectivement meilleures (pas du green washing ou du marketing enjoliveur). Les infirmières et les patients ont très vite compris qu’il était dans leur intérêt objectif de choisir Buurtzorg. L’entreprise Opale qui gagne ainsi des parts de marché a la responsabilité de faire mieux (humainement, écologiquement, qualitativement) que ceux à qui elle a pris ces parts.

Les licenciements

Les licenciements sont rares. Ils adviennent la plupart du temps à la suite de fautes graves (vols, violences, non respect des règles clés du fonctionnement Opale) ou de sureffectif. Dans ce cas, les licenciements se font autant que possible sur la base de départs volontaires accompagnés de primes significatives. Si les partants créent leur propre structure, l’entreprise peut en devenir cliente pour les soutenir.

À savoir : l’apparition de conflits de territoire est souvent un symptôme typique du sureffectif.

Créer ou convertir une entreprise en mode Opale

Il est impératif que les dirigeants soient profondément convaincus par le mode Opale.

Il est important de se former et de se faire accompagner.

Il est toujours plus facile de créer une entreprise Opale que d’en convertir une n’ayant pas été bâtie sur ces bases. Cela parce que les classiques organisations pyramidales et statiques favorisent généralement l’ascension des individus les plus arrivistes et insensibles (cf. les études sur les sociopathes), et ceux-ci voient rarement d’un bon œil l’idée de partager un pouvoir si durement gagné. Ensuite parce qu’une organisation est empreinte d’une inertie culturelle qu’il est difficile de réformer.

Pour convertir son groupe, le DG peut fixer une période transitoire et proposer à ses salariés qui ne souhaitent pas poursuivre sur ce nouveau mode de fonctionnement une prime de départ volontaire. Il s’agira ensuite d’investir en formation des salariés et de veiller à ce que les futurs arrivants soient en phase avec le mode Opale.

Il est crucial que les principes de fonctionnement de l’entreprise (raison d’être, vision de l’humain, processus de prise de décision, de recrutement, de rémunération, de gestion des difficultés internes et externes, d’exclusion) soient coconstruits par l’ensemble de ses acteurs. Ils ne devraient pas être rédigés par une équipe restreinte, puis imposés a l’ensemble du groupe.

En conclusion

Dans une organisation Opale, on fait confiance. C’est avoir foi dans un postulat simple : si ensemble, nous vivons pleinement nos potentiels en les mettant au service d’un objectif commun qui nous tient à cœur (la raison d’être de l’organisation), dans un cadre bienveillant, préservé par le DG et l’exercice de la communication authentique et de la gratitude, alors les résultats seront bons et tout chiffrage et outil de contrôle inutiles.

Cela débouche souvent sur des pratiques très contre intuitives au premier abord, tant nous n’avons pas été éduqués en ce sens. Nombreux étaient ceux qui affirmaient, au lancement de Wikipédia, que c’était de la folie que de laisser à quiconque la liberté d’en modifier les pages ; ils l’utilisent tous aujourd’hui.

Concrètement, l’utopie marche : des entreprises pouvant compter jusqu’à des milliers de salariés fonctionnent ainsi depuis des décennies, atteignant des performances généralement supérieures aux autres acteurs de leur secteur, dans un climat général incomparablement plus qualitatif.

Quelques entreprises pionnières du monde Opale

  • Patagonia, depuis 1957, vêtements d’extérieur, États-Unis, 1350 collaborateurs.
  • Morning Star, 1970, transformation de tomates, Californie, États-Unis, jusqu’à 2400 collaborateurs.
  • Sun Hydraulics, 1970, appareils hydrauliques, États-Unis et international, 900 collaborateurs.
  • FAVI, fonctionnant en mode Opale depuis 1983, métallurgie, France, 500 collaborateurs.
  • Heiligenfeld, groupe allemand d’hôpitaux psychiatriques.
  • Valve, création de jeux vidéo, Seattle, Washington, États-Unis, 400.
  • Usine Volvo de Uddevalla en Suède : a expérimenté le remplacement d’une chaîne de montage rigide par la liberté d’action de ses acteurs réunis en petits groupes de compétence. Plus : https://fr.wikipedia.org/wiki/Uddevalisme
  • La production des contenus de l’encyclopédie en ligne Wikipédia.

Vous trouverez ici une carte (très incomplète) localisant des entreprises Opale : https://www.google.com/maps/d/embed?mid=1DYZ1rMolNLKhFPlHC5t8tJPnRAw

Institutions Opale

Mes travaux en droit constitutionnel et en anthropologie m’ont convaincu que les organisations publiques peuvent être pensées selon le mode Opale. Nous disposons de très peu d’exemples concrets à ce jour, ni même de candidats portant cette dynamique. Mais on peut parier que cela viendra.

Le fonctionnement du ministère de la Sécurité sociale belge a été repensé avec succès dans les années 2000, sur le modèle des « entreprises libérées », sous l’impulsion de Frank Van Massenhove et de Laurence Vanhée.

Autres champs d’application Opale

Au-delà des entreprises privées et des institutions publiques, le mode Opale peut imprégner les associations, les écoles, les ONG, les partis politiques, les religions, les équipes sportives, les familles, etc. En bref, toutes les entités formées d’humains se regroupant pour atteindre des buts.

Plus largement, le stade de conscience Opale permet d’appréhender l’ensemble des activités humaines à sa lumière. Ainsi, modifie-t-il en profondeur nos manières de jardiner, de soigner, d’enseigner, de créer, etc.

L’idée fondamentale est que l’Univers a ses principes autonomes et qu’en les comprenant et les adoptant, on cesse de lutter contre lui pour bénéficier de son élan.

Remarques et questionnements

Remarques

Frédéric Laloux reproduit au début de son ouvrage la classique vision d’un progrès linéaire de la conscience. Attention, il serait difficile de prétendre que les Chinois, les Français ou les Grecs actuels soient plus conscients que leurs illustres ascendants taoïstes, celtes ou philosophes ! Précisons par ailleurs que l’intelligence n’est synonyme ni de conscience, ni de sagesse. Cependant elle stimule les facultés d’apprentissage (curiosité, esprit critique, abstraction, mémorisation, etc.), qui, dans un contexte favorable, peuvent faciliter l’accès à la conscience et à la sagesse. Or la pollution généralisée aurait déjà fait chuter de 4 points le QI moyen des Français entre 1999 et 2009 (source). En Occident, la population aurait perdu en moyenne 13,35 points de QI au cours du siècle dernier (source).

De plus, on sent que pour l’auteur, « conscience plus complexe » et « agissements meilleurs » semblent liés. Cela me semble discutable, mais n’enlève rien au grand intérêt de son ouvrage.

Une critique en anglais a été produite à ce sujet sur le site P2PFoundation : lire le texte.

Le stade Opale n’est pas LE stade ultime de la conscience. Une plus grande conscience encore impliquerait la déconstruction radicale de nos tabous, peurs, addictions, pathologies. En somme, la grande majorité des entreprises actuelles, même Opale, deviendraient obsolètes, faute de marchés.

Questionnements

  • Il semble possible qu’une organisation Opale serve une raison d’être néfaste. Ainsi, certaines entreprises Opale sont engagées dans des activités extrêmement dommageables (industries automobile et aéronautique, transformation de fruits issus de la monoculture et de ses logiques comme chez Morning Star) et il ne semble pas impossible que des entreprises d’armement ou minières, par exemple, puissent fonctionner en mode Opale.
  • Que faire des salariés présentant de lourds problèmes psychologiques ? (Nombreux dans une société pathogène.)
  • Comment protéger efficacement des données cruciales et sensibles en mode Opale (secret défense, données confidentielles, R&D) ?
  • Le fait que les employés doivent trouver des solutions par eux-mêmes présuppose un certain socle d’acquis permettant d’atteindre un certain niveau de solution. Comment faire lorsque ce socle est manquant ?
  • Il semble nécessaire que les employés des entreprises Opale soient préalablement formatés (par un système non Opale) aux paradigmes de la production: travaillisme, technicisme, étatisme, monétarisme.
  • L’organisation Opale semble toujours dépendante du système monétaire et sa survie conditionnée par le rapport temps/gains financiers.
  • Ces entreprises peuvent-elles aisément surmonter le départ de leur dirigeant charismatique ?
  • Si tous les humains fonctionnaient à l’optimum de leurs potentiels, cela accroîtrait-il le degré de production/consommation/ponction des ressources non renouvelables, pressurisant davantage la capacité de charge de notre planète ?
  • Des dirigeants Opale trop performants et dérangeants pourraient-ils être menacés physiquement par leurs concurrents ou les autorités politiques fonctionnant en mode Rouge, Ambre ou Orange ?
  • Le mode Opale nécessite-t-il des prérequis propres à un fond culturel occidentalo-normé ? (Cette question est atténuée par le nivellement planétaire croissant sur le référentiel occidental.)

Ces questionnements ne visent pas à renoncer ou à invalider, mais à pousser la réflexion plus loin.

Pour aller plus loin

Documents

Modèles similaires

Il existe au moins deux méthodes complètes de référence s’inscrivant dans la dynamique Opale :

  • L’Économie de Communion, initiée par le mouvement catholique des Focolaris, vise à la fois à redistribuer une partie des bénéfices de l’entreprise à une œuvre caritative et à prendre soin de la qualité des relations humaines avec les salariés, les fournisseurs, les clients et les concurrents. Exemples d’entreprises vivant ce modèle en France : Inawa (Côte d’Armor) ; Laisné (Ille-et-Vilaine) ; Altériade (société de stratégie de 20 personnes, Lyon). Plus : www.amu-it.eu, www.economie-de-communion.fr
  • La sociocratie est une méthode élaborée dans les années 70 pour une organisation plus agile des entreprises.
  • L’holacratie est une méthode très structurée, initiée en 2001 par l’étasunien Brian Robertson au sein de son entreprise de production de logiciels, Ternary Software, puis conceptualisée en 2007. Elle est actuellement adoptée totalement ou partiellement par quelque 300 organisations lucratives ou non, dont de très grands groupes (Zappos, Danone, Castorama…).
  • L’adhocratie est une méthode présentée en 1970 visant à réunir, en un temps limité, des profils divers en vue d’élaborer une réponse pertinente à un problème précis (utilisée par la Nasa, Motorola).
  • Le design thinking est un processus d’innovation développé dans les années 80 à Stanford, qui conjugue pensées analytique et intuitive, ainsi que des allers-retours entre le créateur et l’utilisateur.

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Vos commentaires

Cet article a 6 commentaires

  1. Anne Evangeline

    Merci Fabrice Gagnant pour ce résumé et pour les questions lancées dans le but de demeurer alerte et de contribuer à l’évolution ou le dépassement de l’Opale ou du Soi humain et du collectif…
    AE

  2. Lecteur

    Merci beaucoup pour votre site. Je n’ai pas eu le temps de lire le livre de Frédéric Laloux, j’ai écouté par hasard un résumé audio sur koober qui m’a intrigué puis je suis arrivé ici. Votre travail est bien plus complet et approfondi ! Je m’intéresse de très prêt au fonctionnement opale pour mon avenir professionnel (terme presque obsolète dans le cadre de ce paradigme !) et je reviendrai ici régulièrement. Merci encore !

  3. Isabelle Janine

    J’adore ! Merci pour vos éclaircissement, précisions, commentaires et questionnements pour élargir la réflexion. J’ai découvert il y a peu le livre de Frédéric Laloux, au cours d’une formation « Mooc » sur la Gouvernance Partagée avec l’ « Université du Nous » et j’adhère à tout cela au point que je me dis … qu’après avoir été plus ou moins « asociale » durant plus de 50 années, je pourrais devenir finalement sociable ???

  4. nicolasstampf

    Excellente page, merci beaucoup !

  5. Anonyme

    Excellente synthèse sur une page.

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